Réunification de la Bretagne
L’amendement qui relance le débat.
Le débat sur le rattachement de la Loire-Atlantique a rebondi à l’Assemblée Nationale, avec l’adoption d’un amendement qui, lors d’un référendum, permettrait de se passer de l’avis des autres départements de la région des Pays-de-la-Loire.
Réactions dans le vignoble.
À la façon des Chouans, ils sont sortis du bois par surprise. Mercredi 21 décembre, dans la matinée, des élus bretons et alsaciens, qui constituaient la majorité de la trentaine des députés présents dans l’hémicycle, ont adopté un amendement à un article du code des collectivités territoriales, organisant les « référendums d’initiatives partagés ». Et ce contre l’avis du reporteur, qui jugeait l’amendement hors sujet, et contre l’avis du gouvernement.
Cet amendement, porté par neuf députés de Bretagne et de Loire-Atlantique, toutes tendances confondues (le Vert François de Rugy et l’UMP Christophe Priou en Loire-Atlantique), modifie les bases d’une éventuelle consultation. Un référendum pourrait désormais être organisé à la demande d’un cinquième des conseillers généraux de Loire-Atlantique, « représentant un dixième des électeurs ». Surtout, pour être validé, le rattachement devrait recueillir lors du référendum une majorité de voix dans se département ainsi que dans les quatre départements de la région « d’accueil », a savoir la Bretagne, contrairement à aujourd’hui, le reste de la région Pays-de-la-Loire n’aurait pas à se prononcer.
« C’est génial » exulte Alan Coraud , le plus « breton » des élus du vignoble, quand on lui apprend la nouvelle « ce qui me fait plaisir, pour l’homme du centre que je suis, explique le maire de la Remaudière, c’est de voir que des élus de gauche et de droite ont voté ensemble. Et c’est un grand pas pour plus d’écoute de la population. Une population qui demande depuis des décennies à vivre ensemble et non coupée par des frontières administratives ».
Alan Coraud trouve légitime de se passer de l’avis de la région actuelle. « On sait que si on demande aux autres départements des Pays-de-la-Loire, ça sera négatif. De toute manière, il me semble logique que se soit à la population vraiment concernée de se prononcer ».
« Nous les Nantais, poursuit-il, on nous a imposé une région. C’est bien pour cela que se pose cette question. Normalement, une région tire sa légitimité de siècles d’histoire, qui forgent une identité partagée par ses habitants. C’est un facteur de cohésion sociale, une cohésion qui favorise le dynamisme économique et la valorisation des productions locales. Les régions à forte identité sont les plus porteuses de projets. Regardez en Europe : la Catalogne, l’Alsace sont des exemples de régions très dynamiques ».
Poignant est contre
Bien que sept des neuf députés à l’initiative de cet amendement soient de son part, Serge Poignant, le député UMP du vignoble, « député de Loire-Atlantique à la frontière de la Vendée et de l’Anjou », ne cache pas son opposition à cet amendement « qui fait bien peu cas des habitant des autres départements. On ne peut pas procéder comme ça, en ne posant pas la question aux autres départements des Pays-de-la-Loire, estime Serge Poignant. Et sans savoir ce que vont devenir les autres départements, où sera la future capitale, sans se poser la question du coût, en pleine crise… je crois qu’en ce moment il y a des questions plus essentielles ».
Serge Poignant ne ferme pas la porte d’un rapprochement, dans le cadre d’un grand Ouest. « Pour l’instant je crois qu’il faut continuer à mener des actions communes Loire-Atlantique/Bretagne, comme il se fait déjà, et peut-être un jour avoir une grande région ».
Comme le maire de la Remaudière, le député du Vignoble ne se fait pas d’illusion sur l’avenir de cet amendement. Il doit être examiné par le Sénat, et devrait avoir encore plus de mal à passer l’étape du conseil constitutionnel. Mais le symbole est là. Et l’amendement a permis à la question de faire une percée sur le plan national. Alan Coraud aimerait d’ailleurs que le rattachement soit un des thèmes de la campagne 2012. Voire que Nicolas Sarkozy agisse : « un président doit être à l’écoute des aspirations. Les cinq conseils généraux bretons et le conseil régional de Bretagne se sont prononcés de nombreuses fois pour la réunification. Récemment encore, le département du Morbihan a voté à l’unanimité, en faveur. Les grands patrons bretons sont pour, des associations aussi, la population aussi si on regarde les nombreux sondages… Moi, je serais partisan d’un décret du Président de la République. Il en a le pouvoir. Et je sais que Nicolas Sarkozy, contrairement à son premier ministre, y est plutôt favorable. Ça serait beaucoup plus simple et plus rapide ».